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L’incongruité des affects : pourquoi on rit parfois quand il ne faut pas ? 

Par Sarah Hellec | Publié le 12/09/2025

On a toutes déjà connu ce moment gênant : un fou rire qui débarque en plein enterrement, une réunion sérieuse, ou même une dispute de couple. Impossible à contrôler, incontrôlable… et tellement mal placé. Mais pas de panique : ce n’est ni un manque de respect, ni une insensibilité. Ce phénomène a même un nom savant : l’incongruité des affects.

Quand nos émotions se mélangent

L’incongruité des affects, c’est le décalage entre ce que l’on vit à l’intérieur et ce que l’on exprime à l’extérieur. Exemple : rire alors qu’on est triste, pleurer en plein moment de joie, sourire en annonçant une mauvaise nouvelle… Bref, une sorte de bug émotionnel. Le cerveau, sous pression, choisit parfois une voie de sortie surprenante. Le rire devient alors un masque : plutôt que de craquer, on explose en fous rires. C’est une réaction réflexe, comme les larmes qui montent après un trop-plein de stress. Rien d’anormal là-dedans.

Pourquoi ça nous arrive ?

Contrairement à ce qu’on croit, rire dans une situation sérieuse n’est pas une preuve d’indifférence. C’est même souvent l’inverse : cela survient lorsque l’intensité est trop forte à gérer ou que le stress est trop intense. Le rire agit comme un exutoire, un moyen de relâcher la tension.

C’est aussi lié à notre culture et à nos apprentissages : on nous a tellement appris à contenir certaines émotions (colère, tristesse, peur) que notre cerveau cherche des chemins détournés pour les exprimer. Et parfois, ça passe par… un sourire mal placé.

Que faire quand ça arrive ?

Déjà, ne culpabilisez pas. Vous n’êtes ni bizarre, ni irrespectueuse. Vous êtes juste humaine. La meilleure façon de désamorcer le malaise est de dire franchement : « Pardon, c’est nerveux ». Dans 90 % des cas, vos interlocuteurs comprendront : eux aussi ont déjà vécu ce grand moment de solitude émotionnelle.

Si vous sentez que ça monte dans une situation sensible (cérémonie, entretien, etc.), vous pouvez respirer profondément ou détourner votre attention quelques secondes pour réguler la pression. Mais s’empêcher totalement de rire ? Mission quasi impossible.

Et si on arrêtait de juger ?

L’incongruité des affects n’est pas une bizarrerie honteuse, c’est une preuve de notre complexité émotionnelle. On ne peut pas toujours tout contrôler, et c’est très bien ainsi. Nos émotions ne sont pas rangées dans des cases bien nettes, elles débordent, s’entremêlent, nous surprennent.

Alors, au lieu de voir ces moments comme des faiblesses, si on les accueillait comme des petites failles d’humanité ? Après tout, le rire, même mal placé, reste un langage universel. Et parfois, c’est la meilleure façon que notre corps a trouvé pour dire : « C’est trop ».